LE PÉCHEUR NOTRE FRÈRE 
LAISSEZ-VOUS RÉCONCILIER

"On n'est jamais pécheur seul car on n'est jamais seul. le péché existe comme une nuit de Dieu, une nuit redoutable qui tombe sur nos cœurs quand nous nous éloignons de sa lumière. Car le péché est forcément l'acte d'un croyant. En dehors de la foi il n'y a que des fautes, des délits, des infractions ou des crimes. Sur eux passe la justice humaine avec ses limites, c'est-à-dire parfois ses sévérités implacables ou ses incompréhensibles laxismes, voire le soupçon qui pèse sur elle d'être souvent "à deux vitesses", la justice des puissants et la justice des faibles. Quand elle ne se transforme pas en piètre "feuilleton de l'été" aux désespérants et suspects rebondissements.

Oui, le péché c'est tout autre chose. Il est cette rupture délibérée de la communion d'amour vitale avec Dieu et avec nos frères qui, en Jésus Christ, sont le visage le plus certain de sa présence autour de nous. Cette rupture est à la fois tragique et mystérieuse.

Tragique, car c'est le choix troublant de ce qui nous fait le plus de mal, de ce qui nous rend le plus malheureux. Si I/amour fait notre joie tout ce qui le nie, l'égratigne, le brise, nous nie, nous égratigne, nous brise. le plus grand malheur de l'homme est cet enfermement sur lui- même dans f/oubli, dans la peur ou dans la haine de ses frères, cette espèce de folie qui le pousse à la vengeance et ne fait que redoubler !es haines dans la violences et le feu. Le péché, en brisant les cœurs, brise les familles, les communautés, les amitiés, les peuples. Sur la croix du Calvaire il est cette lance qui déchire le cœur de Jésus et laisse à son côté cette Inguérissable blessure où Thomas qui n'en croit pas ses frères est invité à mettre le doigt.

Le péché est aussi mystère, celui de cette ombre redoutable au plus profond de notre être, en son "originel! même, et qui nous pousse sans cesse, comme disait Saint Paul, à ne pas faire le bien que nous voudrions et à faire le mal que nous ne voulons pas. Comme une "possession" qui doit nous faire crier au secours pour trouver hors de nous-mêmes une force et une lumière qui nous font cruellement défaut, nous qui sommes si souvent des enfants de ténèbres. Cette force, cette lumière, nous le savons, elle a jailli pour nous au matin de Pâques, du tombeau où la haine et tout le péché du monde pensaient avoir vaincu, le Maître de la vie. En Jésus la mort est vaincue, le péché est vaincu, la vie triomphe, l'amour triomphe.

L'Évangile de ce dimanche nous dit que cette victoire passe d'abord par la réconciliation au sein d'une communauté de foi en Jésus que nous appelons l'Église. Pour nous, tout simplement, elle peut être notre communauté paroissiale. C'est là où le Seigneur nous invite à la réconciliation, ou à tout le moins à la "conciliation". Être conciliant dans un monde si intolérant ce n'est déjà pas si mal.

Surtout quand Jésus ajoute que cet amour restauré est la garantie pour que notre prière soit exaucée. "Quand deux ou trois sont conciliés en mon nom, Je suis là, au milieu d'eux".

Oui, nos disputes et nos conflits chassent inexorablement Jésus de nos assemblées comme elles le chassent de nos cœurs. La présence réelle ce n'est pas magique. Jésus est bien là, encore faut-il que nos regards se détournent pas de Lui... en se détournant du visage de nos frères".

Père BLONDEAU.