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LE PARDON   (le 11 - 09 - 05 ) - -Père J-B Blondeau

LE PARDON 

"Rancune, colère, vengeance, haine. Sombre litanie qu'il est parfois bien difficile de ne pas décliner dans l'amertume. Le Siracide, dans la première lecture, y oppose pardon, pitié, oubli. Comment ne pas reconnaître que l'existence humaine, jusqu'aux limites de son déclin dit encore le Sage, ne cesse de tituber entre ces deux versants des comportements réactifs face aux coups de la vie. La question tracasse Pierre, si facilement gaffeur mais de bonne volonté en fin de compte. On a envie de dire "brave type...". En tout cas le voilà prêt à pardonner sept fois, chiffre parfait, et ce n'est pas peu dire si les sept fois en question concerne la même personne! Lui, en tout cas, après un lâchage devant le danger vraiment peu courageux, aura bien besoin, un jour, de ce pardon. On sait qu'il ne lui aura pas manqué puisque, pour finir, il est devenu la pierre solide qui assure la foi de ses frères jusqu'au don de sa vie.

Mais si pardonner sept fois c'est très bien, Jésus va beaucoup plus loin: Soixante dix sept fois sept fois, et si c'est toujours à la même personne on comprend que le mot qui se cache derrière ces chiffres fabuleux c'est "toujours". Il faut toujours pardonner. La consigne est lâchée. Elle est . énorme, on a envie de dire surhumaine. Comment la mère va-t-elle pardonner au violeur assassin de son enfant, comment pardonner les commanditaires d'un impitoyable génocide et leurs lâches et sadiques exécutants: Shoah, Cambodge, Rwunda, Tchétchénie, etc, hélas. Oui, il ne fait pas de doute que le pardon est au cœur de la spécificité chrétienne. Il retentit jusque dans le dernier souffle du Crucifié: "Père, pardonne-leur...". Et là nous sommes soudain mis sur le chemin de ce qui peut seul rendre possible 11mpossible. Ce n'est pas Jésus qui pardonne, c'est le Père. Jésus est le demandeur, le médiateur de ce pardon. Il en est la raison d'être. Il en est la chair vivante, la chair torturée.

La compréhension, et la possibilité du pardon, est pour le chrétien inséparable de sa compréhension de Dieu. Si le Dieu de notre foi est un Dieu justicier, un Dieu qui punit, qui "fait payer", alors le pardon, le nôtre, est impossible. Et nous avons tendance à projeter sur lui nos ressentiments, et nos indignations, voir à solliciter la mise en œuvre de sa colère, de sa vengeance, comme les disciples qui appelaient le feu du ciel, ni plus ni moins, sur une ville qui les avait mal reçus! C'est parce que nous nous trompons parfois de Dieu que nous avons, dans la vie quotidienne, l'indignation si facile. Nous sommes déçus quand les tribunaux prononcent des peines trop légères à notre gré. Le pardon est impardonnable, et faire payer est un des dogmes intangibles de nos sociétés. Or, nous le savons pourtant, l'Évangile est le radical dépassement de cette loi du talion, la parabole "exagérée" de Jésus l'illustre de façon à la fois colorée et forte: soixante millions de pièces d'argent, formidable montant d'une dette cependant remise, et deux cents pièces impitoyablement exigées jusqu'au fond de la prison où est jeté le compagnon du serviteur impitoyable.

Mais qui sont les acteurs de ces deux mesures si démesurées? On le sait. D'une part, le "Père du ciel", d'autre part vous et moi. Or la justice de Dieu n'est pas celle qu'illustrent les fameuses balances qui ornent les prétoires. La justice de Dieu est notre JUSTIFICATION, et étant donné ce que nous sommes, elle ne va pas sans pardon, le pardon qui vient de Dieu et qui passe par nous selon la logique même de l'Incarnation. Dieu, le roi qui est en scène, est saisi de pitié devant l'énormité de la dette et l'insolvabilité du débiteur. Et chacun sait que la pitié n'est pas du domaine de la justice. Ce roi, comme le maître des ouvriers de la dernière heure, change de régime et passe de la loi à l'amour. Voilà pourquoi sans doute même nos tribunaux humains ne prennent pas en compte le témoignage d'une mère pour son fils. Le droit est relayé par le don, par la gratuité qui ne tient pas compte des mérites.

Ce qui importe pour nous qui sommes si facilement des débiteurs impitoyables, prêts à sauter à la gorge de tous ceux qui nous ont fait du tort, même léger, quelques pièces d'argent, et que dire quand ce tort sera grave et induira une soif de vengeance qui se dissimule souvent sous les apparences d'une soif de justice, oui, ce qui compte pour nous c'est ce que le roi dit au serviteur impitoyable: "ne devais-tu, à ton tour, avoir pitié de ton compagnon comme moi-même j'ai eu pitié de toi." La voilà la source du pardon chrétien, c'est le pardon d'amour infini par lequel le Dieu de notre foi, le Dieu de Jésus, ne cesse de nous justifier, et Jésus lui-même en sa chair, en sa personne, sera le témoignage visible de cet amour fou, de cet amour infini, de cet amour seul capable de vaincre la mort. Si nous pouvons pardonner, c'est parce que Dieu est le premier à pardonner. Notre pardon est comme la rivière née d'une source, et la source est Dieu. Si cette source ne nous traverse pas nous resterons toujours sous le régime de la loi qui appelle vite celui du ressentiment et de la vengeance. Quant à ce pardon reçu de Dieu, c'est le mystère de la Passion de Jésus qui nous en montre l'urgence et la mesure".

Père BLONDEAU.

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