N'
AYONS PAS PEUR !
"Ne craignez pas les hommes dit Jésus. C'est un message fort
de l'Évangile. On sait que Jean-Paul II en fera une sorte de devise : "N'ayez pas peur". Y aurait-il des raisons d'avoir peur? Certes, la vie
chrétienne est un véritable combat. Et toute lutte est redoutable. Elle fait courir des risques. C'est la redoutable conclusion des Béatitudes:
"Heureux êtes-vous lorsque l'on vous insulte, que l'on vous persécute et que l'on dit faussement contre vous toute sorte de mal à cause de
moi. ..". Et plus loin, juste avant le passage de ce dimanche: "Prenez
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garde... vous serez traduits devant des gouverneurs et des rois... Je
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frère livrera son frère à la mort, le père son enfant... vous serez haïs
de tous." Et malgré cela, ces périls longuement détaillés, pour finir: "N'ayez pas peur"...
Mais quel est donc ce dangereux combat qu'il nous faut mener? Ce n'est certes pas une lutte armée, bien au contraire, c'est un combat désarmé.
C'est pour cela qu'il nous expose tant. le colosse bardé d'armes nucléaires, de multiples Divisions, d'une terrifiante force de frappe, idéal de toutes les Nations, y compris la nôtre, celui-là on ne
l'insulte pas, du moins en face, on ne l'agresse pas. Il fait peur!
Est-il si fort que cela pour autant? Regardez du côté de l'Irak et de tant d'autres régions
du monde, nous voyons que ce sont plutôt ceux qui
font peur qui auraient des raisons d'avoir peur. le combat chrétien nous fait aller vers le monde avec des armes qui sont apparemment de
faiblesse, les Béatitudes à nouveau les énumèrent : la droiture du cœur, la
douceur la consolation, l'amour de la justice, la miséricorde, la volonté de paix. Staline, jadis} demandait à compter les Divisions
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du Pape. Où est Staline ? L'Évangile est toujours là, force de
libération qui se propose à tout homme de bonne volonté. N'ayez pas
peur...
Le chrétien est prêt à renoncer à la violence justement parce qu'il n'a
pas peur. la violence est le langage de la peur. Ce qui libère de la
peur c'est la force de l'amour. la violence terrifiée a torturé le Christ
et l'a cloué sur la croix. Mais la force de l'amour a eu le dernier mot, au matin de
Pâques. C'est en ce grand signe pascal dont nous n'aurons jamais épuisé la force de sens et de lumière que nous puisons notre audace, et même
s'il arrive que notre chair
puisse
trembler, notre "âme" n'a pas peur. En Jésus s'est à jamais confirmé que l'amour est la vérité de l'homme, la seule véritable puissance qui puisse le sauver de la peur. On comprend les absurdes errements que l'Église a pu vivre dans son histoire quand elle a prétendu annoncer Dieu, Dieu d'amour qui montre son visage en Jésus, par la violence, croisades,
Inquisition, pouvoir politique, poids trop humain d'institutions pesantes, triomphantes, intolérantes. Mais l'amour a toujours le dernier
mot parce que cette
même
Église n'a cessé d'être traversé par l'Esprit qui l'habite, qui la purifie, qui la fortifie. Elle est là, aujourd'hui, au cœur de notre monde, et la récente agonie de Jean-Paul II
suivie de 1'élan qui accompagna sa mort, montre bien que c'est plutôt sur les voies
de cette pauvreté qu'il faut chercher sa vérité, la vérité de son témoignage, plus
que celle celle des "pompes" romaines!
Sans oublier que la violence peut prendre parfois le visage d'un prosélytisme intempestif. Il peut y avoir des contraintes morales, formulées en de tels termes qu'elles écrasent ou culpabilisent plus qu'elles ne stimulent,
éclairent, orientent. Tout "accompagnateur spirituel" voulant agir au nom de l'Évangile aura toujours à s'en prémunir, tout comme des tentations de "formatages" spirituels qui viseraient à étouffer la liberté. Que de fois, dans l'Évangile, Jésus répète: "si tu veux..." ! "Si tu veux entrer dans la vie... si tu veux être parfait...". La peur de l'enfer, comme on disait jadis, n'est certainement pas le chemin de l'amour et de la liberté évangélique. Ce n'este pas celui que ne cesse de montrer Jésus.
C'est parce que nous croyons à la seule force de l'amour, et à la Résurrection, que nous n'avons rien à craindre. Quelles que soient les violences qui nous
menaceraient, à commencer par cette inéluctable violence qu'est la mort, nous croyons que le dernier mot sera à la puissance de l'amour. N'ayons pas
peur".
Père Jean-Baptiste BLONDEAU
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